Le gouvernement dynamite la mobilité des fonctionnaires !

jeudi 5 mars 2020
par  Sud éduc 34

Tract de SUD éducation 34

Le gouvernement dynamite la mobilité des fonctionnaires !

INTRA 2020 - Nouveautés, analyses et positions de SUD éducation

Cette année le mouvement va être totalement bouleversé à cause de la mise en œuvre de la loi dite de “transformation de la fonction publique” dans l’Éducation nationale. Cette loi, adoptée en août 2019, modifie en profondeur la loi n°84-16 portant dispositions statutaires de la Fonction Publique de l’État. En d’autres termes, elle modifie profondément notre statut et s’attaque frontalement à nos droits et à notre mobilité professionnelle. Le principal objectif de cette loi est de détruire le paritarisme : c’est à dire l’examen conjoint de toutes les opérations de carrière d’un personnel - comme l’avancement ou la mutation - par des représentants des personnels et de l’administration. Petite illustration de cette régression à travers l’exemple du mouvement.

Avant le mouvement 2020 : un paritarisme qui garantissait (un minimum) l’égalité de traitement et la transparence

La vérification des barèmes :
Les personnels formulaient leurs vœux en ligne. Ils pouvaient ensuite vérifier leur barème sur I-prof. Les barèmes de tous les personnels étaient communiqués aux organisations syndicales. Les représentants élus des organisations syndicales procédaient en groupes de travail avec l’administration rectorale à la vérification des barèmes de chaque personnel, individuellement. Le barème de chaque personnel demandant sa mutation était calculé de manière vérifiable, sur la base de critères objectifs : ancienneté dans le poste, rapprochement du lieu de résidence de la ou du conjoint-e, handicap… A l’issue de ces groupes de travail, qui permettaient d’éviter de très nombreuses erreurs, le barème était validé.

Le mouvement :
A partir des barèmes corrigés en groupes de travail, l’administration faisait « tourner » un algorithme qui affectait les personnels en fonction des vœux et barèmes. Les organisations syndicales étaient ensuite destinataires du projet de mouvement. Elles pouvaient alors proposer des modifications pour améliorer les mutations (surtout à INTRA, l’algorithme ayant du mal avec les différents types de vœux). Elles pouvaient également, puisque destinataires de l’ensemble des données du mouvement, vérifier la conformité des affectations (respect du barème et de l’ordre des vœux par l’administration) et l’égalité de traitement entre tous les agents.

La révision d’affectation et les affectations annuelles :
A l’issue de la phase INTRA les personnels non-satisfaits pouvaient demander une révision d’affectation. Un groupe de travail permettait de contrôler la recevabilité des demandes et d’assurer un minimum de transparence et de limiter les dérives. Dérives qui étaient déjà existantes avec l’ancien système et que nous avons souvent dénoncé (voir : Mutations INTRA 2019, arrangements et passe-droits : « L’amour est dans la mut’ »). Enfin, en juillet, des groupes de travail appelés AJUAFA affectaient les TZR, toujours en présence des organisations syndicales qui pouvaient vérifier la conformité des affectations (respect des ZR d’affectation, des vœux et barème…).

Mouvement 2020 : fini la transparence, plus aucun recours

A partir du mouvement 2020 le gouvernement a fait en sorte de supprimer tous les groupes de travail et commissions dans lesquels siégeaient les élus du personnel. De plus ces derniers ne seront plus destinataires de la totalité des documents de travail de l’administration. Ils ne seront plus en mesure de contrôler la conformité des décisions de l’administration. Cela vaut pour toutes les organisations syndicales. Concrètement cela signifie qu’il faudra faire aveuglément confiance à l’administration pour : vérifier les barèmes et corriger toutes les erreurs ; affecter les personnels en fonction de leurs vœux et barèmes ; accorder des révisions d’affectation aux personnes qui devraient en bénéficier ; affecter les TZR en respectant leurs droits.
En cas de litige ou de doute, il n’y aura aucun moyen de vérifier la conformité des affectations. La réglementation prévoit bien une procédure de recours mais aux contours très flous et pilotée par l’administration. Autant dire que les recours qui auront une chance d’aboutir risquent d’être très rares.

Les lignes directrices de gestion académique pour le mouvement INTRA sont parues le 06 février 2020. Elles ont été présentées en comité technique. Ce document confirme l’ensemble des craintes que nous avions exprimé depuis le passage en force de la « loi de transformation de la fonction publique ». Les quelques feuillets qui concernent les personnels enseignants ne sont guère rassurants :
- La mobilité des personnels est avant tout évoquée en terme de satisfaction des besoins de l’employeur,
- Le développement des « postes spécifiques » est inscrit comme un objectif,
- Le barème est plusieurs fois qualifié d’indicatif (ce qui ouvre la porte à des nominations hors barème, donc sans critères objectifs…),
- Les recours ne permettront pas aux personnels et à leurs organisations syndicales de vérifier la régularité des affectations prononcées,
- Les révisions d’affectation ne seront plus aussi bien encadrées et risquent d’être attribuées sans critères objectifs de classement.

Une attaque sans précédent contre nos statuts

Ainsi, sous couvert de simplification, le ministère vide les CAP de leur substance en leur retirant leurs compétences. Le contrôle par les organisations syndicales garantissait un niveau minimal de transparence des mutations, et les contestations étaient peu nombreuses. Avec le nouveau système, les passe-droits, erreurs, manque d’information aux personnels sont amenés à se multiplier. Les personnels des services administratifs ne sont pas assez nombreux pour absorber ce surcroît de travail énorme : ce qui se profile, c’est un fiasco des mutations cette année scolaire et les suivantes, à l’image de ce qu’a donné le mouvement inter dans le premier degré l’année scolaire passée.
Questionné à ce sujet par SUD éducation, le nouveau DGRH s’est contenté de répondre qu’il ne s’agit pour lui que d’un manque de formation des personnels administratifs, et qu’il n’y aurait aucun recrutement pour faire face à l’ampleur de la tâche.

Enfin, le nouveau système prévoit une augmentation importante du nombre de postes à profils, ouverts au recrutement par les services RH des rectorats et des DSDEN, et également aux chef-fe-s d’établissement du second degré. Cela renforcerait de manière inédite le pouvoir des directions d’établissement et renforcerait les inégalités territoriales déjà à l’œuvre, en accentuant la désertification de certains territoires moins attractifs pour les personnels.

Il ne s’agit pas pour SUD éducation d’idéaliser un paritarisme dont on connaît les limites et les dérives, notamment la cogestion et le clientélisme que pratiquent certaines organisations syndicales. Mais derrière les compétences des CAP, ce sont bien les droits de toutes et tous à la mobilité qui sont menacés.
En effet, en vidant les CAP de leurs compétences, il s’agit pour le ministre de faire sauter les verrous en ce qui concerne un certain nombre de droits collectifs, et de renforcer la gestion managériale des carrières.

À l’opposé de cette école et de cette fonction publique de la concurrence et de la compétition entre personnels, SUD éducation revendique, avec l’Union syndicale Solidaires :


- un service public garant des droits des personnels ;
- l’abrogation de la loi dite de transformation de la fonction publique ;
- le maintien d’un système de mutation basé sur un barème chiffré et objectif qui garantit une égalité de traitement et une transparence minimale aux personnels.

Consulter le dossier spécial Mutations INTRA 2020 sur le site de SUD éducation 34


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